Yahya Schroder, ex-défenseur de la laïcité, Allemagne
Description: L’impressionnante histoire d’un adolescent allemand qui se convertit à l’islam et gagne le respect de ses camarades de classe.
- par Yahya Schroder (source : islamonline.net, avec leur permission)
- Publié le 25 Mar 2013
- Dernière mise à jour le 25 Mar 2013
- imprimés: 78
- Lus: 8,403 (moyenne quotidienne: 2)
- Évalué par: 141
- Envoyés: 1
- Commentés: 2
Je m’appelle Yahya Schroder et je suis un musulman européen. Je me suis converti à l’islam il y a onze mois, à l’âge de dix-sept ans. J’habite à Potsdam, en Allemagne, et j’aimerais partager avec vous mon expérience de musulman vivant dans un environnement non-musulman.
Je crois qu’il est peut-être plus facile de pratiquer l’islam, pour un converti, que ça ne l’est pour une personne née au sein d’une famille musulmane, mais vivant dans un environnement comme le nôtre. Car la quasi-totalité des jeunes musulmans de souche que je connais ne souhaitent qu’une chose : devenir Allemands. Pour eux, l’islam n’est qu’une tradition, celle de leur famille, et ils s’imaginent qu’ils doivent abandonner cette tradition pour être acceptés des Allemands. Ils ne semblent pas se rendre compte que de toute façon, les Allemands ne les accepteront pas même s’ils laissent tomber leur religion.
J’ai grandi dans un petit village. J’y vivais avec ma mère et mon beau-père dans une immense maison avec un grand jardin et une grande piscine. Adolescent, je menais une vie agréable; j’avais des amis, avec lesquels je sortais parfois et avec lesquels je faisais les folies typiques des adolescents.
Être musulman, en Allemagne, n’est pas toujours évident, car les préjugés sont tenaces. Demandez à un Allemand ce qu’il connaît de l’islam et la plupart du temps, il vous dira quelque chose sur les Arabes. Car pour eux, c’est une équation mathématique : islam=Arabes.
Ils ne connaissent pas grand-chose sur la nation musulmane. Lorsque je me suis converti, j’ai dû quitter ma famille et déménager à Potsdam, près de Berlin. J’ai quitté cette belle maison où j’habitais et presque toutes mes possessions matérielles.
Quand je vivais avec ma mère et mon beau-père, j’avais tout : mon propre argent, une télé à moi, un Playstation, etc. Je n’avais aucun souci financier, mais je n’étais pas heureux. Je ressentais un manque, dans ma vie, j’étais à la recherche de quelque chose que j’étais incapable de définir.
Lorsque j’eus seize ans, j’entrai en contact avec la communauté musulmane de Potsdam par l’intermédiaire de mon père biologique, qui s’était converti à l’islam en 2001. À l’époque, je lui rendais visite une fois par mois et nous assistions, ensemble, aux assemblées de la communauté qui avaient lieu les dimanches.
L’islam m’intéressais et lorsque mon père s’en rendit compte, il me dit qu’il se retiendrait de me parler d’islam, car il préférait que je l’apprenne de personnes très versées dans la religion, de sorte que les gens ne diraient pas, si je me convertissais : « Bien sûr, il est devenu musulman à cause de son père. »
Je me rangeai à son argument et me mis à fréquenter la communauté chaque fois que je lui rendais visite, ce qui me fit apprendre beaucoup sur l’islam. C’est au cours de cette période qu’un incident me fit changer ma façon de penser. Un dimanche, j’allai me baigner avec des membres de la communauté musulmane et un mauvais plongeon, au cours duquel je frappai le fond de la piscine avec ma tête, me laissa avec deux fractures de la colonne.
Mon père me conduisit d’urgence à l’hôpital, où le médecin me dit :
« Tu as de très graves fractures, dans la colonne, et si tu fais un seul faux mouvement, tu risques de rester handicapé. »
Puis, quelques minutes plus tard, on me conduisit en salle d’opération. Tout juste avant que j’y entre, un de mes amis musulmans me dit : « Yahya, tu es maintenant entre les mains d’Allah; place toute ta confiance en Lui. » Cela m’aida beaucoup à gérer mon stress.
L’opération dura cinq heures et je ne me réveillai que trois jours plus tard. Je ne pouvais bouger mon bras droit, mais je sentais que j’étais la personne la plus heureuse sur terre. Je dis au médecin que peu m’importait mon bras droit, j’étais si heureux que Dieu m’ait permis de survivre à cet accident.
Les médecins m’avaient dit que je devrais passer quelques mois à l’hôpital. Mais je n’y demeurai que deux semaines, car je faisais de très gros efforts pour récupérer. Un jour, un médecin me dit : « Aujourd’hui, tu vas essayer de monter une seule marche d’escalier », mais il ignorait que j’avais déjà fait cet exercice, de mon propre chef, deux jours auparavant.
Aujourd’hui, alhamdoulillah (Dieu merci), je peux à nouveau bouger mon bras droit. Cet accident changea beaucoup de choses en moi.
J’ai remarqué que lorsque Dieu décide d’une chose, la vie d’un individu peut se retrouver sens dessus dessous en une seconde. Je me mis à réfléchir davantage sur le sens de la vie et sur l’islam, mais je vivais toujours dans ce petit village avec ma mère et mon beau-père.
Mon désir de devenir musulman devint si fort que je dus quitter la maison familiale. Je quittai ma mère, mon beau-père et mon mode de vie facile et aisé et me rendis à Potsdam. J’emménageai dans le petit appartement de mon père et dus m’installer dans la cuisine, mais cela m’allait tout de même, car je n’avais emmené, avec moi, que quelques vêtements, mes livres d’école et quelques CD.
Malgré ce changement de vie drastique, j’étais heureux, aussi heureux que le jour où je m’étais réveillé, à l’hôpital, après mon opération. Le jour suivant mon emménagement était le premier jour de Ramadan. Et, le surlendemain, mon premier jour dans ma nouvelle école.
Le jour suivant, mon premier jour d’école, je prononçai la shahada (profession de foi permettant à une personne d’embrasser l’islam). Gloire à Dieu. Tout était nouveau, pour moi : un nouveau lieu de vie, une nouvelle école et une nouvelle vie sans ma famille près de moi. Et, à l’école, dès que les gens apprirent que j’étais musulman, ils se mirent à se moquer.
Je crois que c’est un peu normal, compte tenu de ce qu’on leur fait croire, dans les médias. J’entendis toutes sortes de moqueries, « terroriste », « Osama ben Laden est là », « les musulmans sont sales », certains croyaient que j’étais tout simplement fêlé. Et nombreux sont ceux qui refusèrent de croire que j’étais bel et bien allemand.
Mais maintenant, dix mois plus tard, la situation change petit à petit. J’ai beaucoup éduqué mes camarades de classe sur l’islam et j’ai réussi à obtenir la permission d’aller prier dans une petite salle, même si je suis le seul à y aller.
Mes camarades de classe, plutôt que de se moquer, comme au début, me posent maintenant des questions très sérieuses sur l’islam et ils se rendent compte que cette religion est vraiment différente des autres.
Ils voient que nous, musulmans, avons de bonnes manières et savons traiter les autres avec respect. Ils voient également que nous ne succombons pas à la pression sociale; nous sommes fidèles à nous-mêmes et ne ressentons pas le besoin de faire partie d’un groupe comme la plupart des gens.
À mon école, tous les jeunes tentent de devenir membre de l’un des trois principaux groupes. Sauf moi! Je suis capable d’être ami avec tous et je ne ressens pas le besoin de porter des vêtements dernier cri ou de style particulier pour me sentir « cool ». Alors ils n’hésitent pas à nous inviter, mes amis musulmans et moi, à leurs barbecues. Ils me respectent en tant que musulman et vont même jusqu’à acheter de la viande halal, pour nous. Ici, à Potsdam, les gens sont beaucoup plus ouverts envers l’islam.