Jerald F. Dirks, ex-pasteur de l’église méthodiste unie, USA (partie 4 de 4)

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Description: La vie aisée et l’éducation d’un diplômé de Harvard, et auteur du livre « The cross and the crescent » (la croix et le croissant), désillusionné par le christianisme après avoir étudié la théologie.  Partie 4 : De la croix au croissant.

  • par Jerald F. Dirks
  • Publié le 01 Sep 2008
  • Dernière mise à jour le 02 Sep 2008
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Nous étions maintenant au mois de mars 1993 et ma femme et moi profitions de vacances de cinq semaines au Moyen-Orient.  C’était aussi le mois de Ramadan, moment où les musulmans jeûnent de l’aube au coucher du soleil.  Comme nous étions souvent en compagnie de membres des familles de nos amis musulmans vivant aux États-Unis, ma femme et moi prîmes la décision de jeûner aussi, ne fût-ce que par courtoisie.  Durant cette période, j’avais aussi commencé à accomplir les cinq prières quotidiennes avec mes nouveaux amis musulmans dont je venais de faire connaissance au Moyen-Orient.  Après tout, rien, dans ces prières, ne recevait ma désapprobation.

J’étais chrétien, ou du moins c’est ce que j’affirmais.  J’étais né dans une famille chrétienne, on m’avait élevé dans le christianisme, j’avais assisté à la messe et à l’école du dimanche, j’étais diplômé d’un prestigieux séminaire et j’avais été ordonné pasteur d’une importante dénomination protestante.  Mais j’étais aussi un chrétien qui ne croyait ni en la trinité ni en la divinité de Jésus (que la paix soit sur lui); qui savait que la Bible avait été corrompue; qui avait prononcé la shahadah dans ses propres mots alambiqués; qui jeûnait le mois de ramadan; qui priait, comme les musulmans, cinq fois par jour; qui était très impressionné par les bonnes manières et le bon comportement de la plupart des musulmans, tant au Moyen-Orient qu’aux États-Unis.  (Le temps et l’espace ne me permettent pas de détailler ici tous les exemples de bonne moralité et d’éthique dont j’ai été témoin au Moyen-Orient.)  Lorsqu’on me demandait si j’étais musulman, je me lançais la plupart du temps dans un monologue de cinq  minutes dans lequel je reprenais les arguments énumérés ci-dessus; autrement dit, je ne répondais pas vraiment à la question.  Je m’adonnais à des jeux de mots intellectuels auxquels j’excellais.

La fin de notre voyage approchait.  Un ami d’un certain âge (qui ne parlait pas un mot d’anglais) et moi marchions sur une petite route tortueuse, quelque part dans un quartier pauvre d’Amman, en Jordanie.  Tout à coup, un autre homme d’un certain âge, venant en sens inverse, s’approcha de nous et dit « assalam’alaikum » (i.e. « que la paix soit sur vous ») et nous tendit la main.  Il n’y avait que nous trois, je ne parlais pas vraiment l’arabe et aucun des deux ne parlait l’anglais.  Me regardant, l’étranger demanda : « mouslim? » (i.e. « musulman? »).

À cet instant précis, je me sentis complètement, totalement piégé.  Je ne pouvais jouer aucun jeu intellectuel, car nous n’avions pas de langue de communication commune.  Il n’y avait aucun traducteur pour m’aider, et qui aurait pu me permettre de me réfugier derrière mon monologue soigneusement préparé.  Je ne pouvais non plus faire semblant de ne pas avoir compris la question, car il n’était que trop évident que je l’avais comprise.  Cette situation soudaine, je ne l’avais pas prévue; mes choix de réponses furent dès lors réduits à deux : je ne pouvais que répondre « n’am », i.e. « oui », ou « la », i.e. « non ».  Je devais choisir entre ces deux réponses, je n’avais pas d’autre choix.  Je devais choisir, et je devais le faire à l’instant même.  Gloire à Dieu, je répondis « n’am ».

En prononçant cette unique parole, toutes mes acrobaties intellectuelles furent désormais derrière moi, de même que les jeux psychologiques par lesquels je me faisais croire à moi-même que j’étais encore chrétien.  Je n’étais plus ce chrétien étrange, atypique.  J’étais musulman.  Gloire à Dieu, ma femme, avec laquelle j’avais été jusque-là marié 33 ans durant embrassa elle aussi l’islam à peu près à la même période.

Quelques mois après notre retour aux États-Unis, un voisin nous invita chez lui afin, nous dit-il, de nous entretenir au sujet de notre récente conversion à l’islam.  C’était un pasteur méthodiste à la retraite, avec lequel j’avais discuté à plusieurs reprises dans le passé.  Nous avions déjà abordé, bien que superficiellement, le sujet de la composition artificielle de la Bible à partir de sources premières et indépendantes, mais nous n’avions jamais eu de discussion en profondeur sur la religion.  Je ne savais pas grand’chose à son sujet, à part le fait qu’il avait acquis une solide éducation au séminaire et qu’il chantait chaque dimanche dans le chœur de l’église locale.

Ma première réaction fut « et voilà… ».  Néanmoins, comme il est du devoir du musulman d’être un bon voisin et qu’il est également de son devoir de parler d’islam avec les autres, j’acceptai l’invitation pour le soir suivant, et je passai presque toute la journée à penser à la meilleure approche à utiliser lorsque viendrait le moment d’aborder le cœur du sujet.  Le soir, ma femme et moi nous rendîmes chez nos voisins.  Après avoir échangé quelques banalités, il finit par me demander pourquoi j’avais décidé de devenir musulman.  J’attendais la question et ma réponse était soigneusement préparée : « Comme vous le savez, de par l’éducation que vous avez reçue au séminaire, plusieurs considérations non-religieuses ont mené aux décisions du concile de Nicée… »  Il me coupa immédiatement par une question directe : « Vous ne pouviez tout simplement plus endurer le polythéisme, n’est-ce pas? »  Il savait donc parfaitement pourquoi j’étais devenu musulman et le plus incroyable est qu’il était d’accord avec ma décision!  Pour lui-même, à son âge et dans la position qu’il occupait, il avait choisi d’être un « chrétien atypique ».  J’espère qu’il aura été de la volonté de Dieu qu’il ait maintenant fait la transition de la croix au croissant.

Être musulman en Amérique demande des sacrifices.  En fait, être musulman tout court demande des sacrifices, n’importe où dans le monde.  Mais ces sacrifices sont peut-être ressentis avec plus d’intensité en Amérique, surtout chez les Américains convertis.  Certains de ces sacrifices sont prévisibles, comme les modifications dans la façon de s’habiller, le fait de ne pas consommer de porc ni d’alcool, ou encore d’éviter de recevoir ou de payer des intérêts.  Mais d’autres sacrifices sont moins prévisibles.  Par exemple, une famille chrétienne avec laquelle nous étions étroitement liés nous laissa entendre qu’elle ne pouvait plus nous fréquenter car elle ne voulait pas être associée à des gens « qui n’acceptent pas Jésus comme sauveur personnel ».  Par ailleurs, plus d’un collègue de travail changea d’attitude envers moi.  J’ignore si c’est une coïncidence ou non, mais de moins en moins de patients furent orientés vers mon cabinet, ce qui provoqua une chute de 30% de mes revenus professionnels.  Donc certains de ces sacrifices moins prévisibles furent difficile à accepter, mais tout compte fait, un bien faible prix à payer pour ce que j’allais recevoir en retour.

Ceux qui envisagent une conversion à l’islam, i.e. la soumission à un Dieu unique, doivent savoir qu’il y aura des sacrifices qui les attendront tout au long de cette voie.  Certains sont prévisibles, tandis que d’autres sont plutôt surprenants et inattendus.  Je tiens à vous présenter les choses sous leur vrai jour et c’est pourquoi je ne nierai pas la réalité de ces sacrifices.  Néanmoins, ne soyez pas troublés outre mesure par ces sacrifices.  En dernière analyse, ils sont moins importants qu’ils peuvent paraître.  Si Dieu le veut, vous trouverez que c’est peu cher payé pour ce que vous recevrez en retour.

Jerald_F._Dirks__Minister_of_United_Methodist_Church__USA_(part_4_of_4)_001.jpg

Note : Le certificat d’ordination, ci-dessus, était trop long pour être scanné au complet – il manque la ligne du haut, qui dit : « Que tous les hommes sachent que ».

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