L’intérêt et son rôle au sein de l’économie et de la vie en général (partie 2 de 8) : Le point de vue de l’islam
Description: Point de vue islamique sur le rôle de l’intérêt dans la société d’aujourd’hui, suivi d’une étude historique et contemporaine de l’intérêt. Partie deux : coup d’œil sur certains textes tirés du Coran et de la sounnah, qui mettent sévèrement en garde contre l’intérêt.
- par Jamaal al-Din Zarabozo (© 2011 IslamReligion.com)
- Publié le 14 Feb 2011
- Dernière mise à jour le 14 Feb 2011
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Les textes islamiques sur l’intérêt
Lorsqu’on lit les textes islamiques qui traitent de l’intérêt, on est tout de suite frappé par la sévérité des mises en garde contre cette forme de transaction financière. L’islam interdit un certain nombre d’actes immoraux comme la fornication, l’adultère, l’homosexualité, la consommation d’alcool et le meurtre. Mais le nombre de discussions et la sévérité des mises en garde pour ces actes ne sont rien comparativement à celles relatives à l’intérêt. Une telle constatation a d’ailleurs poussé Sayyid Qutb à écrire : « Aucun autre acte n’a été dénoncé et condamné, dans le Coran, aussi rigoureusement que l’intérêt. »[1]
Dans le Coran, par exemple, on retrouve les versets suivants, au sujet de l’intérêt[2]:
« Ô vous qui croyez! Ne dévorez pas d’intérêts usuraires en multipliant (la somme prêtée). Craignez Dieu; peut-être réussirez-vous. Et craignez le Feu préparé pour les mécréants. » (Coran 3:130-131)
Cette mise en garde sévère servie aux croyants laisse entrevoir une conséquence terrible : être jeté dans le feu de l’Enfer, préparé pour les mécréants.
Dans le Coran, Dieu dit également :
« Ceux qui vivent de l’intérêt usuraire seront ressuscités (au Jour dernier) comme des gens que le toucher de Satan a rendus déments. Cela parce qu’ils disent : « Le commerce est comme l’intérêt », alors que Dieu a permis le commerce mais interdit l’intérêt usuraire. Celui qui, ayant reçu une exhortation de son Seigneur, cessera (par obéissance) pourra conserver (les profits) qu’il a acquis par le passé; et son affaire, dorénavant, est entre les mains de Dieu. Quant à celui qui récidivera… les voilà les gens du Feu, dans lequel ils demeureront éternellement. Dieu réduira à néant l’intérêt usuraire et fera fructifier les aumônes. Et Dieu n’aime pas le pécheur qui se complaît dans l’infidélité. » (Coran 2:275-276)
Plusieurs points sont à souligner, dans ces versets. Commentant la première partie du verset ci-dessus, Maudoodi a écrit :
Tout comme une personne folle, non retenue par la raison, a recours à toutes sortes d’actes immodérés, de même celui qui prend de l’intérêt. Il se livre entièrement à sa passion pour l’argent, comme s’il était fou. Peu lui importe que l’intérêt tue les fondements même de l’amour entre les hommes, de la fraternité et de la sympathie pour autrui, qu’il sape le bien-être et le bonheur de la société dans son ensemble ou que son enrichissement se fasse au détriment du bien-être d’autrui. Tel est l’état de sa folie en ce monde. Et comme chacun ressuscitera, dans l’au-delà, dans le même état où il était au moment de sa mort, il sera ressuscité en tant que dément.[3]
Par ailleurs, il ressort clairement de ces versets qu’il y a une différence entre les transactions financières légitimes et l’intérêt. Cette différence est si évidente que le Coran ne prend même pas la peine de l’expliquer. Ensuite, il est clairement mentionné que « Dieu réduira à néant l’intérêt usuraire et fera fructifier les aumônes ». Il s’agit là d’une des lois de Dieu, que les hommes ne comprennent pas toujours. Car les effets négatifs ultimes de l’intérêt usuraire sur les individus, la société et l’humanité, à la fois dans cette vie et dans l’au-delà, ne sont connus que de Dieu. Nous verrons tout de même, plus loin, quelques-uns de ces effets négatifs confirmant la vérité de ces versets. Pour souligner la signification de ces versets, le Prophète (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) a dit : « L’intérêt – même s’il est d’un montant important – finira par ne rapporter qu’une somme médiocre. »[4] Il ne fait aucun doute que, dans l’au-delà, lorsque les hommes rencontreront leur Seigneur, tout ce qu’ils auront amassé par de tels moyens illégaux sera la source de leur propre destruction.
Peu après les versets cités ci-dessus, Dieu ajoute :
« Ô vous qui croyez! Craignez Dieu et laissez tomber ce qui vous est dû de l’intérêt usuraire, si vous êtes (vraiment) croyants. Si vous ne le faites pas, soyez avertis d’une guerre que vous déclareront Dieu et Son messager. Mais si vous vous repentez, il vous restera vos capitaux (sans intérêts). Ne lésez personne et vous ne serez point lésés. » (Coran 2:278-279)
Quelle personne saine d’esprit irait s’exposer de son plein gré à une déclaration de guerre de la part de Dieu et de Son messager? Car on ne peut imaginer de pire menace que celle-là. À la fin du verset, Dieu nous fait comprendre pourquoi l’intérêt est interdit : il s’agit d’un moyen par lequel les gens se causent du tort les uns aux autres. Le terme arabe utilisé dans le verset est dhoulm, qui signifie une personne qui en lèse une autre ou qui l’opprime, ou une personne qui cause du tort à son âme. Ce verset démontre que l’interdiction de l’intérêt n’est pas qu’une simple règle décidée par Dieu sans aucune raison logique. L’intérêt est bel et bien nuisible et c’est pourquoi il a été interdit.
De son côté, le prophète Mohammed (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) a fait plusieurs déclarations au sujet de l’intérêt. Dans la déclaration suivante, il exprime clairement la gravité d’un tel péché :
« Évitez les sept péchés qui poussent l’homme à sa destruction : attribuer des associés à Dieu, pratiquer la sorcellerie, tuer une personne que Dieu a interdit de tuer – sauf lorsque permis par la loi – faire affaire avec les intérêts, dévorer les biens de l’orphelin, fuir lorsque deux armées se rencontrent et calomnier des croyantes chastes et innocentes. » (al-Boukhari et Mouslim)
Ces deux autres déclarations du Prophète (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) devraient suffire à convaincre tout individu craignant Dieu de se tenir éloigné de l’intérêt sous toutes ses formes. Le Prophète, donc, a dit :
« [L’équivalent] d’une seule pièce [d’argent] en intérêt sciemment consommé par une personne est pire, aux yeux de Dieu, que trente-six relations sexuelles illicites. » (at-Tabarani et al-Hakim)
Jaabir a rapporté que le messager de Dieu (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) a maudit celui qui reçoit de l’intérêt, celui qui paie de l’intérêt, ceux qui sont témoins [du contrat à intérêts] et ceux qui mettent [ce contrat] par écrit. Puis, il a ajouté : « Ils sont tous pareils. » (Mouslim)
C’est un principe de base, en islam : si une chose est interdite, le musulman ne doit y participer ni l’appuyer d’aucune façon. Comme l’intérêt est interdit, il est également interdit de servir de témoin pour de tels contrats, de les mettre par écrit, etc. Le Prophète a également dit très clairement qu’il n’y a aucune différence entre celui qui paie de l’intérêt et celui qui en reçoit. Cela parce qu’ils sont tous deux impliqués dans un acte méprisable et qu’ils sont donc, par conséquent, tous deux coupables.
Le prophète Mohammed (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) a également dit :
« Si les relations sexuelles illicites et l’intérêt deviennent ouvertement répandus dans une cité, les gens qui s’y trouvent se sont eux-mêmes exposés au châtiment de Dieu. » (at-Tabarani, al-Hakim)
Cette affirmation fait référence à l’une des « lois sociétales » de Dieu. En effet, Son châtiment peut prendre diverses formes, en ce monde comme dans l’au-delà.
Footnotes:
[1] Sayyid Qutb, In the Shade of the Quran (Markfield, Leicester, England: The Islamic Foundation, 1999), vol. 1, p. 355.
[2] Le terme arabe utilisé dans ces versets est ribaa, qui peut être défini comme « un excès et un ajout; un ajout à la somme principale [qui est prêtée ou dépensée] ».
Certains traducteurs du Coran (incluant Abdoullah Yusuf Ali, Pickthall, Khan et al-Hilali) ont choisi de traduire le terme ribaa par « intérêt » ou « usure ». Cela a mené à une certaine confusion, même chez les musulmans occidentaux. L’ Oxford English Dictionary définit l’usure comme « le fait ou la pratique consistant à prêter de l’argent à intérêt et, plus tard, la pratique de charger, de prendre ou de recevoir des taux d’intérêt excessifs ou illégaux pour de l’argent prêté. » En d’autres termes, il fut un temps où le terme « usure » équivalait à l’acte de prêter de l’argent à intérêt, à une époque où c’était considéré comme un acte méprisable. Puis, après que l’intérêt fut rendu légal, le terme « usure » fut plutôt défini comme « prêter à taux excessifs ou illégaux ». En termes contemporains, le terme arabe ribaa doit être traduit par « intérêt », puisqu’il inclut tous les paiements versés en supplément de la somme principale.
[3] Sayyid Abu Ala Mawdudi, Towards Understanding the Quran (Leicester, United Kingdom: The Islamic Foundation, 1988), vol. 1, p. 213.
[4] Rapporté par al-Hakim. Voir al-Albani, Sahih al-Jami al-Sagheer, vol. 1, p. 664, hadith no. 3543.
L’intérêt se résume à amasser toujours plus d’argent et ce, presque toujours sans que cet argent ne subisse de risque. Mais à long terme, une telle pratique ne rend pas nécessairement heureux : « Un sondage rapporté dans le Business Week du 16 octobre 2000 conclut que l’argent n’achète pas le bonheur et que le mode de vie moderne et ses contrecoups sont à la source d’une augmentation du mécontentement, chez les gens. Selon cette étude, même s’il y a eu une augmentation des salaires per capita entre 1970 et 1998, les Américains sont devenus moins heureux. Les nouvelles tendances sociales ont porté ombrage aux gains matériels. Selon l’étude, même si un salaire plus élevé est plus susceptible de créer un sentiment de bonheur, un tel impact demeure étonnamment faible; des facteurs tels que le genre et le statut jouent un rôle plus important à ce niveau.
Une autre découverte de cette étude est que les femmes sont plus malheureuses que les hommes. L’augmentation des divorces et des séparations a un impact négatif sur les familles et sur l’équilibre mental de ses membres. Business Week conclut ainsi : « [Cette étude] suggère à tout le moins que ceux qui croient que le revenu garantit à lui seul le bonheur se font des illusions. Et elle suggère également que certains aspects de la nouvelle économie, comme une augmentation des périodes de chômage et une plus grande iniquité salariale, ont des coûts psychologiques non négligeables. » Abdulhay Y. Zalloum, Painting Islam as the New Enemy: Globalization & Capitalism in Crisis (Technology One Group S.A. 2002), p. 357.
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