Raphael Narbaez, Jr., pasteur chez les Témoins de Jéhovah, États-Unis (partie 1 de 2)
Description: Un pasteur et comédien désillusionné par sa religion.
- par Raphael Narbaez, Jr.
- Publié le 02 Oct 2017
- Dernière mise à jour le 02 Oct 2017
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Raphael, un Latino de 42 ans, est établi à Los Angeles, où il est comédien et conférencier. Il est né au Texas, où il a assisté à sa première réunion des Témoins de Jéhovah à l’âge de six ans. Il a prononcé son premier sermon religieux à l’âge de treize ans, s’est retrouvé à la tête de sa propre congrégation à l’âge de 20 ans et occupé une position de leadership parmi les 904 000 Témoins de Jéhovah des États-Unis. Mais il a depuis échangé sa Bible pour un Coran après avoir visité une mosquée près de chez lui.
Le premier novembre 1991, il est devenu musulman et a, par le fait même, apporté à la communauté musulmane de sa région ses habiletés organisationnelles et oratoires qu’il avait développées au sein des Témoins de Jéhovah. Bien que nouveau converti, il arrive à faire rire d’eux-mêmes les immigrants musulmans.
Il raconte ainsi son histoire :
Je me souviens très clairement d’une discussion, avec d’autres Témoins de Jéhovah, dans le salon de mes parents. Ils parlaient d’Armageddon, de la fin des temps, de Jésus qui allait revenir, de grêlons qui allaient tomber et qui seraient aussi gros que des voitures, de Dieu qui allait détruire le système corrompu et abolir les gouvernements, de la Bible qui disait que la terre allait s’ouvrir et avaler des pâtés de maison entiers.
Je n’étais encore qu’un enfant et j’étais mort de peur. Puis, ma mère se tourna vers moi et me dit : « Tu vois ce qu’il adviendra de toi si tu n’es pas baptisé et si tu n’obéis pas à Dieu? La terre s’ouvrira et t’avalera et l’un de ces énormes grêlons tombera sur ta tête, t’assommera et tu n’existeras plus jamais. Et moi, je devrai faire un autre enfant. »
Bien sûr, je n’allais pas prendre le risque d’être atteint par l’un de ces énormes grêlons, alors je me fis baptiser. Et comme les Témoins de Jéhovah ne croient pas suffisant de vous asperger d’un peu d’eau bénite, ils vous submergent complètement, vous maintiennent sous l’eau une ou deux secondes, puis vous ramènent à la surface.
J’avais treize ans, lorsque je fus baptisé, le 7 septembre 1963, à Pasadena, Californie. C’était au Rose Bowl, une grande assemblée internationale qui comptait 100 000 personnes. Nous nous y étions rendus en voiture, de Lubbock, Texas.
Avec le temps, je fis des sermons de plus en plus longs (dix minutes) devant la congrégation. Un responsable me demanda de faire des sermons d’une heure, les dimanches, lorsqu’ils invitent le public à entrer. Habituellement, c’étaient les séniors de la congrégation qui faisaient de tels sermons.
Je l’entendis dire à un autre témoin : « Oui, il est jeune, mais il en est capable. C’est un bon chrétien; il n’a aucun vice, il est obéissant envers ses parents et semble avoir une très bonne connaissance de la Bible. »
C’est ainsi qu’à l’âge de seize ans, je commençai à prononcer des sermons d’une heure devant de grandes congrégations. On m’envoya d’abord à Sweetwater, Texas, et, plus tard, à Brownfield, Texas, où on m’attribua une congrégation juste à moi. À l’âge de vingt ans, j’étais devenu ce qu’ils appelaient un pasteur pionnier.
Les Témoins de Jéhovah ont un programme d’entraînement très sophistiqué et ils ont ce qui ressemble à un système de quotas. Chaque témoin doit consacrer dix à douze heures par mois à faire du porte-à-porte. C’est comme un bureau de gestion des ventes. Même IBM ne peut rien leur apprendre.
Je devins donc un pasteur pionnier et je passai le plus clair de mon temps à faire du porte-à-porte. Je devais faire près de 100 heures par moi et je devais en plus participer à sept sessions d’étude de la Bible. Je commençai également à faire des sermons devant d’autres congrégations. On me donna de plus en plus de responsabilités et je fus accepté dans une école de Brooklyn, New York, une école d’élites où les Témoins envoient la crème de la crème, le 1% de jeunes les plus talentueux. Mais je n’y allai pas.
Certaines choses avaient de moins en moins de sens à mes yeux. Par exemple, le système de quotas. J’avais l’impression qu’à chaque fois que je tentais de franchir une nouvelle étape, je devais faire certaines choses pour démontrer mon degré de piété. C’était comme si on me disait : « Si tu atteints tes quotas, ce mois-ci, ça veut dire que Dieu t’aime. Si tu ne les atteints pas, c’est que Dieu ne t’aime pas. » Cela n’avait aucun sens. Un mois, Dieu m’aime et, le suivant, Il ne m’aime pas?
Nous critiquions l’Église catholique parce que ses fidèles devaient se confesser à un prêtre. Et nous disions : « Nul ne devrait avoir à confesser ses péchés à un homme! » Et pourtant, nous avions un groupe de séniors que nous étions obligés de voir régulièrement. Nous devions leur avouer nos péchés, puis ils nous disaient : « Attends un instant… » Ils réfléchissaient. Peut-être pensaient-ils : « Qu’en dis-Tu, Seigneur? Non? ». Puis, ils revenaient vers nous en disant : « Bon, je suis désolé, j’ai fait de mon mieux, mais il semble que tu ne sois pas assez repentant. Ton péché est trop important, alors soit tu perds ton poste au sein de l’église, soit tu vas en probation. »
S’il s’agit d’un péché contre Dieu, ne devrais-je pas demander pardon directement à Dieu?
Je crois que ce qui a fait déborder le vase, c’est quand j’ai commencé à remarquer que certains séniors lisaient de moins en moins la Bible. Les Témoins de Jéhovah ont des livres sur tous les sujets, qui sont publiés par la Watch Tower Bible and Tract Society. Selon eux, les seules personnes sur la planète qui savent correctement interpréter la Bible sont ce groupe d’hommes, ce comité, à Brooklyn, qui disent à tous les Témoins de Jéhovah à travers le monde comment ils doivent s’habiller et parler, ce qu’ils doivent dire et ne pas dire, comment appliquer les écritures et à quoi ressemblera l’avenir. Dieu leur a dit tout cela et ils nous le transmettent. J’avoue que j’appréciais ces livres. Mais si la Bible est le livre du savoir et qu’elle contient les commandements de Dieu, ne devrions-nous pas chercher les réponses dans la Bible?
Je me mis à dire à mes coreligionnaires : « Ne vous souciez pas trop de ce que la Watch Tower vous dit; lisez plutôt la Bible. » Des oreilles se mirent à se dresser.
Certains se mirent à chuchoter qu’il y avait peut-être un apostat parmi eux. Même mon père me dit : « Tu ferais mieux de faire attention; ce sont les démons qui parlent à ta place. Ils tentent de nous infiltrer pour causer la division parmi nous. »
Je dis : « Papa, ce ne sont pas les démons. Les gens n’ont pas besoin de lire toutes ces publications; ils peuvent trouver les réponses à leurs questions dans la prière et la Bible. »
Spirituellement, je n’étais plus à l’aise. Alors, en 1979, sachant que je ne pouvais plus aller de l’avant, je quittai les Témoins de Jéhovah, mécontent et avec un goût amer dans la bouche. Toute ma vie, je m’étais investi corps et âme dans cette église et c’était justement cela, le problème : je ne m’étais pas investi en Dieu, mais dans une organisation créée par les hommes.
Je ne pouvais pas me tourner vers les autres religions. Chez les Témoins, on m’avait appris à démontrer, par les écritures, que toutes les autres religions étaient fausses. Que l’idolâtrie était répréhensible. Que la trinité n’existait pas.
J’étais comme un homme sans religion. Mais certainement pas un homme sans Dieu. Mais vers où pouvais-je me tourner?
En 1985, je décidai de venir à Los Angeles et de tenter d’aller au Johnny Carson Show pour faire ma marque en tant que comédien et acteur. J’avais toujours senti que j’étais né pour accomplir quelque chose. Je ne savais pas si ce serait pour découvrir un remède contre le cancer ou pour devenir comédien. Je continuai de prier, mais cela finit par m’exaspérer.
Alors je me rendis, un jour, à l’église catholique près de chez moi. Je me souviens, lors du mercredi des cendres, lorsque l’on m’appliqua des cendres sur le front… Je voulais vraiment trouver la vérité. Je continuai d’aller à cette église durant deux ou trois mois, jusqu’à ce que je n’en puisse plus. Ça se résumait souvent à :
Levez-vous. Asseyez-vous.
Levez-vous. Asseyez-vous.
Sortez la langue.
Cela me fit faire beaucoup d’exercice; je crois que je perdis au moins trois kilos. Mais ce fut tout. Et, par la suite, je me sentis plus perdu que jamais.
Mais jamais, à travers tout cela, il ne me passa par la tête ne fut-ce qu’une seconde que Dieu n’existait peut-être pas. J’ai d’ailleurs Son numéro de téléphone, mais sa ligne est toujours occupée. Pour gagner ma vie, je fis quelques expériences au cinéma. Un film intitulé Deadly Intent. Une publicité pour une compagnie de téléphone à Chicago. Une autre pour Exxon et deux pour des banques. Entretemps, comme il fallait manger, je travaillais aussi dans la construction.
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