Malcolm X, USA (partie 2 de 2)

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Description: L’histoire du cheminement vers l’islam de l’une des personnalités afro-américaines les plus connues.  Partie 2 : un nouvel homme, porteur d’un nouveau message.

  • par Yusuf Siddiqui
  • Publié le 05 Jan 2009
  • Dernière mise à jour le 05 Jan 2009
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L’unicité de l’homme sous l’unicité de Dieu

C’est au cours du pèlerinage que Malcolm se mit à écrire des lettres à ses fidèles assistants de la nouvelle mosquée de Harlem et à leur demander de les photocopier et de les distribuer aux médias :

« Jamais je n'ai connu d'hospitalité aussi sincère, de fraternité aussi bouleversante que celles des hommes et de femmes de toutes races réunis sur cette vieille Terre Sainte, patrie d'Abraham, de Mohamed et des autres prophètes des Saintes Ecritures. Jamais je n'ai été honoré comme ici. Jamais je ne me suis senti plus humble et plus digne. L'Amérique a besoin de comprendre l'islam, parce que c'est la seule religion qui ignore le racisme. Ce pèlerinage m'a obligé à réviser certaines idées qui étaient miennes, à rejeter certaines conclusions auxquelles j'étais parvenu. Au cours des onze journées que j'ai passé ici, dans le monde musulman, j'ai mangé dans le même plat, bu dans le même verre, dormi dans le même lit (ou sur le même tapis) j'ai prié le même Dieu que mes coreligionnaires aux yeux les plus bleus, aux cheveux les plus blonds, à la peau la plus blanche. Dans leurs paroles comme dans leurs actes, les musulmans "blancs" sont aussi sincères que les musulmans "noirs" d'Afrique nigériens, soudanais, ghanéens. Nous sommes véritablement frères. Parce qu'ils croient en un seul Dieu, ils excluent toutes considérations de race de leur esprit, de leurs actes, de leurs comportements. J'ai pensé en les voyant que si les blancs américains admettaient l'Unicité de Dieu, ils pourraient peut-être admettre l'unicité de l'homme et ils cesseraient de s'affronter, de nuire à autrui pour des raisons de couleur. Le racisme étant le véritable cancer de l'Amérique, nos "chrétiens" blancs devraient se pencher sur la solution islamique du problème; solution qui a fait ses preuves, et qui pourrait peut-être intervenir à temps pour sauver l'Amérique d'une catastrophe imminente. Celle-là même qui s'est abattue sur l'Allemagne raciste et qui a finit par détruire les Allemands eux-mêmes. »

« On m’a demandé ce qui m’avait le plus impressionné au Hajj et j’ai répondu : « La fraternité! ».  Ces gens de toutes les races et de toutes les couleurs, réunis en un seul et même lieu...  J’y ai vu toute la puissance de notre Dieu unique.  Tout, dans l’atmosphère du Hajj, nous rappelait l’unicité de l’homme sous l’unicité de Dieu. »

Malcolm revint du pèlerinage portant un nouveau nom : El-Hajj Malik al-Shabazz.  Il vivait un intense renouveau spirituel et pour lui, sa lutte s’était déplacée; il n’était plus un nationaliste luttant pour les droits civiques des Noirs, mais un humanitaire luttant pour les droits de l’homme, de tous les hommes.

L’après-pèlerinage

Les journalistes de race blanche avaient hâte de connaître les nouvelles opinions qu’El-Hajj Malik s’était faites à leur sujet.  Ils pouvaient à peine croire que cet homme qui, durant tant d’années, avait prêché contre eux pouvait soudainement changer d’avis et les appeler ses frères.  À ces gens, El-Hajj Malik avait ceci à dire :

« Vous me demandez si j’ai bel et bien dit que désormais, je considère les Blancs comme des frères.  Ma réponse est que dans le monde musulman, j’ai senti que mon esprit s’était ouvert et c’est ce que j’ai écrit dans mes lettres.  Alors que je les écrivais, je ressentais, au fond de moi, un amour véritable et fraternel envers les musulmans de race blanche qui ne manifestaient aucune animosité envers les musulmans d’autres races ou couleurs.

« Mon pèlerinage m’a ouvert l’esprit et m’a apporté de nouveaux points de vue.  En deux semaines, en Terre Sainte, j’ai vu ce que je n’ai jamais vu en trente-neuf ans aux États-Unis.  J’ai vu des gens de races et de couleurs diverses s’unir, fraterniser et adorer Dieu ensemble, des gens qui n’auraient même pas su définir le terme « ségrégation ».

« Il est vrai que par le passé, j’ai fait des déclarations à l’emporte-pièce au sujet des Blancs.  Je ne m’en rendrai jamais coupable à nouveau; car je sais maintenant que certains Blancs sont vraiment sincères, que certains sont réellement capables de considérer comme frère un homme de race noire.  L’islam véritable m’a appris que les accusations généralisées à l’endroit des Blancs sont aussi inacceptables que les accusations généralisées à l’endroit des Noirs. »

Aux Noirs qui le percevaient comme un leader, El-Hajj Malik se mit à prêcher un nouveau message, totalement différent de celui qu’il prêchait alors qu’il était ministre dans la Nation de l’islam :

 « J’ai appris, dans le véritable islam, que divers éléments religieux, politiques, économiques, psychologiques et raciaux sont essentiels pour former une société humaine complète.

« J’ai dit à mes auditeurs de la rue Harlem que ce n’est que lorsque l’humanité se soumettrait au Dieu unique, qui nous a tous créés, qu’elle pourrait tendre vers la paix dont on entend tellement parler, mais pour laquelle si peu d’actions sont entreprises. »

Trop dangereux pour durer

Le nouveau message universaliste d’El-Hajj Malik représentait le pire cauchemar de l’establishment américain.  Non seulement s’adressait-il aux Noirs, mais aussi aux intellectuels de toutes les races et de toutes les couleurs.  Les médias se mirent donc à le démoniser, l’accusant de militantisme et d’encouragement à la violence alors qu’en réalité, sa vision des choses se rapprochait de plus en plus de celle de Martin Luther King :

« Le but a toujours été le même, avec des approches aussi différentes que les miennes et celles des marches pacifiques de Luther King, qui dévoilent au grand jour les brutalités perpétrées contre des Noirs sans défense par des hommes de race blanche.  Dans le climat racial que connaît notre pays, aujourd’hui, il est impossible de dire laquelle de ces approches visant à régler les problèmes des Noirs est la moins bonne : la « non-violente » de King, ou la mienne, soi-disant « violente ». »

El-Hajj Malik savait parfaitement qu’il était la cible de plusieurs groupes hostiles à ses propos.  Malgré cela, il ne s’empêchait jamais de dire ce qu’il avait à dire, au moment où il jugeait bon de le dire.  À la fin de son autobiographie, il écrit :

« Je sais qu’il est souvent arrivé que des sociétés tuent ceux qui les avaient aidées à changer pour le mieux.  Et si je meurs en ayant apporté une certaine lumière, en ayant mis de l’avant une vérité significative qui aidera à enrayer le cancer du racisme aux États-Unis... alors tout le mérite en revient à Dieu et toute erreur commise dans le processus aura été mienne. »

L’héritage de Malcolm X

Même si Malcolm X savait qu’on cherchait à l’assassiner, il en acceptait le risque sans demander de protection policière.  Le 21 février 1965, alors qu’il s’apprêtait à prononcer un sermon dans un hôtel de New York, il fut tué par balles par trois hommes de race noire, à trois mois de ses quarante ans.  Bien qu’il soit clair que la Nation de l’islam ait joué un rôle dans cet assassinat, nombreux sont ceux qui croient que plus d’une organisation était impliquée.  Certains ont même suggéré que le FBI, connu pour ses tendances racistes, avait été complice du crime.  Peut-être ne saurons-nous jamais avec certitude qui était derrière le meurtre d’El-Hajj Malik ou même des meurtres de plusieurs leaders nationaux du début des années soixante.

La vie de Malcolm X a affecté de diverses façons certains Afro-Américains, qui ont développé un nouvel intérêt envers leurs racines islamiques.  Alex Haley, qui a rédigé l’autobiographie de Malcolm, a plus tard écrit l’épopée Roots, qui décrit l’expérience de l’esclavage d’une famille africaine musulmane.  De plus en plus d’Afro-Américains se convertissent à l’islam, adoptent un nom musulman ou s’intéressent à la culture africaine.  Il y a eu récemment un regain d’intérêt pour la vie de Malcolm X suite à la sortie du film « X », de Spike Lee.  El-Hajj Malik est une source de fierté pour les Afro-Américains, les musulmans, et les Américains en général.  Son message était simple et clair :

« Je ne suis raciste d’aucune façon.  Je ne crois en aucune forme de racisme, ni en aucune forme de discrimination ou de ségrégation.  Je crois en l’islam.  Je suis musulman. »

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