Le hijab dans la Bible et la Torah (partie 1 de 2): Le hijab au sein des différentes dénominations chrétiennes
Description: L’histoire du voile dans l’église chrétienne.
- par Aisha Stacey (© 2016 IslamReligion.com)
- Publié le 11 Jul 2016
- Dernière mise à jour le 20 Jan 2020
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Le mot hijab signifie voiler, couvrir, cacher. Et il va au-delà d’un simple code vestimentaire; il touche également aux limites morales et au respect de la femme. Il joue un rôle dans la cohésion d’une communauté et dans le comportement modeste. De nos jours, le mot hijab est devenu synonyme de foulard. Sa signification fait parfois référence à certaines normes vestimentaires culturelles telles la burqa, en Afghanistan, le tchador, en Iran et le shalwar kamis, au Pakistan. Le hijab revêt donc plusieurs significations, mais dans ces deux articles, nous ferons surtout référence au fait de se couvrir la tête et au hijab tel que décrit dans la Bible et la Torah.
Les premiers écrits historiques faisant référence au fait de se couvrir la tête, pour les femmes, remontent aux textes légaux assyriens du 13e siècle avant J.-C. Seules les femmes de la noblesse se couvraient alors la tête. Il était interdit aux prostituées, aux esclaves et aux femmes pauvres de faire de même. Il existe des traces écrites faisant référence à divers couvre-chefs, chez les femmes, au sein des empires grec et romain. À Rome, se couvrir la tête était associé à la prière et à la dévotion, tandis qu’en Grèce, certaines poteries et sculptures de l’époque mènent à croire que les femmes jugées respectables se couvraient la tête pour sortir de chez elles. Au fur et à mesure des découvertes historiques et archéologiques, les opinions sur le sujet varient, mais il demeure certain que le fait de se couvrir la tête, chez les femmes, était bel et bien une réalité de l’époque.
Fait intéressant, les versets bibliques auxquels font référence les chrétiens pour justifier que les femmes doivent se couvrir la tête, particulièrement en prière ou à l’église, viennent des lettres de Paul aux Corinthiens. Corinthe était une ville située sur la péninsule du sud de la Grèce et faisait partie de l’empire Romain à l’époque où ces lettres furent écrites. Comme on y trouvait un mélange de cultures, grecque, romaine et juive, il est pertinent de se demander quelles normes culturelles dominaient alors.
1Corinthiens 11:5 dit : « Mais si une femme prie ou prophétise la tête non couverte, elle outrage son chef à elle, car elle se place ainsi sur le même plan qu'une «femme tondue». » Les femmes chrétiennes d’autrefois se couvraient la tête non seulement à l’église, mais aussi en public, et elles perpétuèrent cette pratique jusqu’aux 19e et 20e siècles (selon les pays), avant qu’elle ne décline rapidement par la suite.
À Corinthe et à travers l’histoire du christianisme, le fait de se couvrir la tête était considéré comme un signe de soumission à l’autorité, à Dieu et au mari (c’est toujours le cas chez certaines dénominations chrétiennes). Les chrétiens du second siècle, en Égypte, furent exhortés, par le théologien Clément, à « … se rendre à l’église décemment vêtus, d’un pas naturel, en silence, avec un amour sincère, un corps et un cœur purs, prêts à prier Dieu. Que la femme respecte en plus cette règle : qu’elle soit entièrement couverte, à moins qu’elle ne soit dans sa maison. Car cette façon de se vêtir est austère et la protège des regards. Et elle ne doit jamais fauter ni inviter les autres à fauter en découvrant son visage. Tel est le souhait de Dieu, qu’elle prie en étant voilée. »[1]
Les racines historiques du voile en Europe occidentale remontent à l’empire byzantin, où l’on attribuait un haut rang social aux familles dont les femmes se voilaient la tête. Au Moyen-Âge, il était de coutume, chez les femmes mariées, de couvrir leurs cheveux de différentes manières. Des peintures de femmes urbaines, en Europe occidentale, montrent souvent des femmes dont seuls le visage et les mains sont découverts. À l’époque, les ouvrières et les paysannes qui ne se couvraient pas étaient considérées comme « faciles ». On retrouve également ce caractère « non-respectable » des femmes découvertes dans le Coran, qui affirme que le fait de se couvrir est un signe de dignité pour les croyantes.
« Ô Prophète! Dis à tes épouses, à tes filles et aux femmes des croyants de ramener sur elles leurs grands voiles [lorsqu’elles se déplacent à l’extérieur]. Elles en seront plus aisément reconnues et éviteront d’être importunées. » (Coran 33:59)
Lorsqu’une chrétienne décide d’entrer chez les sœurs, on dit qu’elle « prend le voile ». À travers l’histoire chrétienne, les religieuses ont toujours été facilement reconnaissables grâce à leurs habits particuliers, qui ressemblent à ceux des musulmanes. À l’époque médiévale, en Occident, les femmes mariées couvraient habituellement leurs cheveux à l’extérieur de leur maison. C’est ainsi qu’on leur accordait le même respect que l’on accordait aux religieuses, qui se vêtaient de façon modeste.
Certains indices suggèrent que le fait de se couvrir la tête, en Espagne, fut influencé par la présence des musulmans en Andalousie et par les musulmanes de l’Afrique du Nord voisine. La mantille, cette petite écharpe de dentelle qui était d’usage, entre autres, dans l’Espagne de la fin du 16e siècle, était presque toujours utilisée lors des messes catholiques à travers le monde. La reine Isabelle II encourageait d’ailleurs son usage, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’église. Après son abdication, en 1870, l’usage de la mantille devint largement limité aux occasions formelles et à la messe. Étrangement, l’obligation, pour les femmes, de se couvrir la tête à l’église ne fut introduit, dans le droit canon, qu’en 1917. Jusqu’en 1983, l’Église catholique exigeait que les femmes se couvrent la tête en entrant dans une église. Avant 1917, une telle loi n’existait pas, même s’il était d’usage pour les femmes de se couvrir la tête.
Bien que l’usage du voile et des écharpes ait grandement diminué, certaines dénominations chrétiennes l’imposent encore. Durant près de 2000 ans, les femmes orthodoxes, fussent-elles grecques, serbes, russes, égyptiennes ou syriennes, sont allées à l’église la tête couverte. L’Église orthodoxe universelle impose un code vestimentaire visant à éviter les distractions durant la prière. En Albanie, les chrétiennes portent souvent de grands voiles blancs et dans les bâtiments de l’Église orthodoxe albanaise, les femmes sont séparées des hommes par des cloisons en treillis. Enfin, chez plusieurs petites dénominations protestantes, les femmes se couvrent la tête. On pense, ici, aux Amish, aux Mennonites et aux Huttérites, entre autres. Dans ces dénominations protestantes, même s’il n’y a pas de texte officiel imposant de se couvrir la tête, plusieurs femmes décident de le faire sur la base de leur compréhension de 1Corinthiens 11. Par ailleurs, certaines catholiques choisissent de se couvrir la tête pour imiter la Vierge Marie. Cette dernière couvrait ses cheveux par respect pour la coutume juive de l’époque et nous jetterons un coup d’œil aux coutumes vestimentaires judaïques dans le prochain article.